Partenaire fidèle de la troupe du Collège dont il a plus dune fois enregistré les prestations avec laide de quelques apprentis cameramen, notre collègue Paul CONVENS assume cette fois un rôle plus « spectaculaire » dans le déroulement de la fête, puisquaux décors visuel et sonore sajoutent des séquences filmées.
Comment est née lidée dun mariage entre théâtre et cinéma ?
Lidée était déjà dans lair lors de la mise en chantier de Pygmalion, il y a deux ans. Luc Collin avait songé à cette possibilité avant dy renoncer. Pour cette pièce-ci Jean-Claude Georges a cherché son inspiration du côté de Moulin rouge et de la Traviata, ce qui imposait presque irrésistiblement le recours aux images filmées. Jai accepté sa proposition avec enthousiasme, dautant que les moyens techniques ne manquent pas au Collège. Le défi était tentant et théoriquement réalisable.
Pour le Grand Meaulnes que Jean-Claude Georges, associé à Dominique Deffense, a réalisé en 1990, les paysages de Sologne « capturés » par Thierry Renauld ont permis une évocation presque parfaite du climat de luvre. Est-ce dans cet esprit que le travail a été mené ?
Dans une certaine mesure, oui. Il faut dire que le roman dAlain-Fournier et le drame de Dumas font la part belle aux aspects oniriques. La part du rêve y est telle que les images et la musique sassocient opportunément aux mots prononcés : ils peuvent accentuer lexpression du sentiment et contribuer à la création dun climat. Mais le rôle de limage, ici, dépasse cet aspect. Limage na rien de surajouté : elle sinscrit dans le récit.
La coexistence des décors de théâtre et des images filmées na-t-elle pas suscité des problèmes techniques ?
Inévitablement. Il a fallu chercher un écran à la fois réfléchissant et transparent, un écran que le regard puisse traverser et auquel il puisse sarrêter. Pour le reste, lencombrement na pas été un problème insurmontable étant donné la discrétion du décor. Celui-ci se compose daccessoires quasi symboliques qui ne réduisent guère le champ. Non, lobjectif essentiel a été linterpénétration des deux techniques. Lalternance de séquences dramatiques et de séquences fi lmées aurait posé moins de problèmes. En optant pour limbrication, nous ne nous sommes pas facilité la vie. Le public jugera du résultat : nanticipons pas !
Reste la question de la chronologie. Lintrigue a été déplacée à la fi n du 19ème siècle ou au début du 20ème , dans un univers coloré par lart nouveau. Fort bien, mais comment filmer aujourdhui des réalités qui renvoient au « modern style »?
En fait, nous avons opté pour le télescopage dépoques. Nous avons pris le parti de lanachronisme. Ainsi, par exemple, Marguerite Gautier, comédienne dautrefois, se prépare dans sa loge avant de monter sur scène pour chanter... aujourdhui. Dautre part, le voyage de Marguerite est placé dans son contexte temporel. Le tournage des scènes « à lancienne » est en accord avec les costumes dépoque. Nous avons pu disposer, grâce à lamabilité de M. Swaelens, dun véhicule qui est un authentique ancêtre : une Amilcar 1924. Les tournages en extérieurs ont été réalisés dans la région des Trois Vallées, près de Mariembourg, où les responsables locaux nous ont réservé un merveilleux accueil. Lévénement sortait de lordinaire : une équipe technique et une trentaine dacteurs au bord du Viroin, à proximité dun train à vapeur, témoin dépoques révolues... En revanche, les séquences du concert appartiennent au temps présent, à lactualité du Collège.
Au total, que faut-il retenir du travail accompli ?
Un défi excitant a été relevé. Loin de rechercher la fi délité au texte de départ (un tantinet bavard, avouons-le), on a opté pour une recréation par limage, la musique et le clip. On a tenté de suggérer par limage et le son le défi lé du temps. Le jeu en valait bien la chandelle.
Voilà vraiment de quoi aiguiser notre curiosité et notre impatience!